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Élections, piège à cons ? Échange instructif pour la JC 15 avec Jean Salem sur la place des élections dans notre stratégie politique

26 Mai 2012 , Rédigé par JC Paris XV Publié dans #Actualité

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Échange instructif pour la JC 15 avec Jean Salem sur la place des élections dans notre stratégie politique

 

 

C'est une vingtaine de camarades de la JC du 15ème et d'ailleurs qui ont participé à l'initiative organisée par notre section avec Jean Salem, professeur de philosophie à la Sorbonne, animateur du séminaire Marx XXI.

 

Une initiative qui prenait pour thème son dernier livre « Elections, piège à cons ? », d'une actualité certaine au sortir d'une année électorale qui nous a emmené, en tant que communistes, à nous reposer la question du sens des élections pour une organisation révolutionnaire comme la nôtre.

 

Le secrétaire de la JC 15 a insisté sur la nécessité de replacer les élections dans notre stratégie politique : celle de la conquête d'une autre société que le capitalisme, le socialisme, qui passe par une rupture politique révolutionnaire.

 

Une fois arrivée au constat qu'aucune révolution sociale aboutie n'est arrivé au pouvoir par les urnes, de Cuba à la Russie, que la plupart des transformations sociales profondes conquises chez nous l'ont été par la lutte – grandes grèves de 36, Résistance, mai 68 – et enfin que chaque fois que la bourgeoisie a été mise en difficulté, elle n'a pas hésité à abolir le jeu électoral, comme au Chili en 1973 par exemple, quelle place pour les élections dans notre ligne politique ?

 

En revenant sur notre histoire et sur nos références théoriques, les élections ont trois fonctions :

 

  • c'est une tribune, celle que mettait en avant déjà Marx et Engels. Elle n'a de sens que si sont affirmées des idées communistes et si elles ne sont pas cachées derrière des formations au contenu idéologique flou dans l'espoir d'hypothétiques gains électoraux ou de sièges ;

 

  • c'est un thermomètre. Lénine défendait la démocratie bourgeoise comme le meilleur régime pour l'expression des idées communistes, dans l'Etat et la révolution. Il n'y a aucune contradiction, les élections permettent de voir l'état du rapport de force même déformé, par les fraudes ou les manipulations idéologiques. Un résultat électoral n'a de sens encore une fois que si il est l'expression d'un message politique clair ainsi que d'un travail d'une organisation de classe et de masse dans la société ;

 

  • c'est un point d'appui enfin. Gramsci, souvent mécompris, a réalisé une critique féroce des institutions bourgeoises et des Appareils idéologiques d’État (médias, école, université) qui créent un consensus dans la société civile autour de la défense de l'ordre capitaliste. Le rôle du Parti communiste est de briser ce consensus d'abord dans la société (civile) et pas dans les institutions politiques. Pour Gramsci, le parti, par ses cellules de quartier et d'entreprises, doit mener un long travail préalable, une guerre de position, où il va s'agir de faire bouger le rapport de force (faire bouger les tranchées), conquérir des points d'appui (les casemates/forteresses de la bourgeoisie), un préalable à la guerre de mouvement : la révolution proprement dite ;

 

Jean Salem a ensuite développé devant nous les principaux éléments de réflexion présents dans son livre, une présentation organisée en trois axes :

 

  • la critique acerbe du cirque électoral, alimenté par un jeu médiatique qui verrouille toute émergence d'une alternative. Des mascarades électorales où ceux qui présentent un discours de gauche s'empressent le lendemain de contredire leurs promesses, où le népotisme (« les dynasties démocratiques ») et le clientélisme règnent ;

 

  • le constat d'un pouvoir confisqué par les élections. Certes, les élections sont bien un « baromètre » pour juger du « degré de maturité de la conscience populaire » (Engels). Lénine, très finement dans le contexte du tsarisme, adaptait ses consignes de vote au contexte : tantôt abstention, tantôt vote à telle élection, en fonction de ce qui pouvait y être gagné. Mais il faut bien s'attendre par ce que l'on entend par démocratie. Pour un démocrate comme Rousseau, les élections et la représentation sont antithétiques à la démocratie, la vraie, celle directe, reposant sur une souveraineté inaliénable. Rousseau disait ainsi du peuple anglais qu'il n'est « libre qu'une fois tous les trois ans », avant et après les élections il disparaît en tant que peuple. De toute manière, la démocratie représentative telle qu'on l'a connue, tend elle aussi à être remise en cause par un système capitaliste qui n'hésite pas à bafouer les votes des peuples lorsqu'ils ne correspondent pas. On peut penser aux vote contre le Traité constitutionnel européen entre 2005 et 2008 en Hollande, en Irlande et en France, tous déjugés par les « élus » du suffrage universel ;

 

  • le spectacle d'une élection ininterrompue, tout coule à l'élection, tout en dérive. C'est l' « électionite », on saute d'une élection à une autre, les lignes politiques s'adaptent au gré des sondages, vérité absolue qui oppose une opinion publique sage à des minorités, la rue, trop bruyante. La politique n'en est réduite qu'au détail, à la frivolité, aux artifices médiatiques ;

 

L'intervention de Jean Salem a été saluée par tous les jeunes communistes présents et a donné lieu à un débat animé autour de questions d'actualité pour l'essentiel :

 

la question de Mélenchon et du Front de gauchea été évoquée. Tous ont émis de lourdes critiques sur l'effacement de notre point de vue communistes mais les interprétations ont divergé entre ceux qui voient certains éléments positifs tantôt dans la campagne de Mélenchon tantôt dans la radicalisation d'une partie de l'électorat, et une majorité inquiète d'une dérive de personnalisation, de « peoplisation », bien intégrée au cirque médiatique décrit par Jean Salem mais aussi d'un enfermement dans un cadre institutionnel, électoral, maîtrisé par la classe dominante. Dans l'ensemble, il a été rappelé que la vingtaine d'adhésions de la JC 15 depuis septembre l'ont été ni sur une base d'adhésion ni de dénigrement public du Front de gauche mais bien sur une base de lutte, sur l'affirmation de nos principes communistes et sur notre travail de terrain,dans les quartiers, lycées et entreprises du 15ème ;

 

la Grècea aussi préoccupé certains camarades, avec l'opposition de plus en plus nette entre le PC Grec, le KKE, et Syriza, une coalition hétérogène dite de « gauche radicale ». Il a été unanimement salué le rôle essentiel joué par le KKE dans le développement des luttes en Grèce et il a été évoqué les positions conciliantes de Syriza avec l'UE, à tel point que M.Tsipras, son leader a récemment écrit une lettre aux dirigeants de l'UE pour proposer ses services afin d'assurer la stabilité en Grèce et en Europe !

 

La question du rejet de la Vème république a enfin été posée, avec son système présidentiel qui aboutit à la personnalisation de la politique, et le scrutin majoritaire, qui bi-polarise le débat politique autour d'une alternance sans alternative. De Gaulle l'a conçu pour tuer le Parti communiste, il faut rompre avec elle non seulement dans les discours mais aussi dans les faits. Ne pas succomber à la personnalisation et à l'alternance sans alternative.

 

Le débat s'est poursuivi autour d'un verre, dans une ambiance fraternelle. Tous d'accord sur un point : si il ne faut pas négliger l'opportunité des élections pour faire entendre nos idées communistes, le changement ne passera pas par les élections !

 

Voici la vidéo de l'intervention de Jean Salem : http://vimeo.com/42581330

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